Pour un front vert du travail

Manifeste

Nous sommes travailleuses et travailleurs. Nous sommes les têtes, les mains, les corps de cette société. Nous sommes uni-es par au moins une condition : il nous faut un salaire pour acheter notre survie.

Pour ce salaire, nous sommes souvent obligé-es de travailler dans des conditions que nous n’avons pas choisies; forcé-es de nous épuiser dans les embouteillages; condamné-es à cumuler des emplois sous-payés; contraint-es de travailler dans des usines, des classes et des hôpitaux mal aérés l’été et chauffés au gaz l’hiver. L’organisation du travail épuise la vie: celle de notre corps comme celle de notre habitat terrestre.

Nous produisons du jetable. Nous sacrifions des lacs et des forêts. Nous soignons avec des horaires qui nous rendent malades. Nous éduquons une jeunesse que l’on prive d’avenir. Cette contradiction nous brûle. Nous réclamons le droit de « gagner notre vie » sans contribuer à l’effondrement du vivant.

On oppose souvent les emplois et l’écologie. Mais ce n’est pas le travail qui s’oppose à ce qui rend la vie humaine possible, ce sont les exigences toujours croissantes de productivité et de profit.
Nous voulons des emplois pour pouvoir manger. Mais il faut plus qu’un salaire pour mettre du pain sur la table. On ne fait pas de pain sans céréales, sans soleil, sans eau, sans la vie grouillante de la terre. Préserver cet équilibre maintenant fragile nous force à opérer une transition juste, à remplacer des emplois sans sacrifier ceux et celles qui les occupent, pour continuer à manger, oui, mais aussi pour défendre la dignité du travail utile, du travail bien fait, d’un travail qui a du sens.

Nous revendiquons une organisation du travail qui redonne au vivant autant qu’elle lui prend. Le syndicalisme doit devenir un écosyndicalisme : il doit défendre, bien plus que des salaires et des congés, des conditions de travail qui enrichissent et régénèrent notre notre milieu de vie.

C’est en nous appuyant sur nos syndicats que nous pourrons contrer le ravage. Nous avons le pouvoir de sonner l’alarme et de forcer l’arrêt de la machine. Par notre intelligence démocratique, par nos actions de mobilisation, par la solidarité que nous bâtissons, par notre pouvoir de grève, nous pouvons renverser la vapeur.

Les carburants fossiles sont aujourd’hui la principale menace à la préservation de l’humanité, mais aussi de l’ensemble du vivant. Il faut s’en libérer. La crise écologique ne se résoudra pas en achetant une voiture électrique. Ce sont les transports publics qu’il faut déployer partout, c’est le chauffage au gaz qu’il faut détrôner, ce sont nos manières d’habiter, de produire et de manger qu’il faut révolutionner. Le réchauffement climatique n’est plus une éventualité, c’est une réalité. Nous revendiquons la sortie des énergies fossiles d’ici 2030.

C’est pour les profits titanesques d’une minorité que l’on continue à piller les forêts, les montagnes et les océans. C’est pour cette même richesse privée que l’on pille notre temps, au détriment de notre santé, de notre sommeil et de nos proches. C’est aussi pour permettre que cette richesse continue de s’accumuler sans que les possédant-es aient à payer leur dû que l’on impose périodiquement l’austérité à nos écoles, à nos garderies, à nos hôpitaux, à nos transports publics et à notre culture. Ceux qui accumulent le plus ne créent aucune richesse : ils la prennent sans honte en semant la désolation derrière eux. Les peuples autochtones et les personnes les plus précaires, surtout au Sud, sont les premier-ères à en payer le prix.

Pour faire face aux catastrophes d’aujourd’hui et de demain, nous avons besoin de services publics forts et de programmes d’aide accessibles. Nous revendiquons une taxation massive de la richesse pour assurer des conditions de vie décentes à tous et toutes.

Mais nous ne voulons pas seulement une plus grande part du gâteau. Nous voulons changer sa recette.

Les travailleuses et travailleurs doivent avoir leur mot à dire sur ce qu’il faut faire dans leur milieu. Ce sont les gens de chaque quartier, de chaque village et région qui doivent contribuer à établir les limites, en faisant toute la place aux savoirs écologiques pertinents. Nous en avons soupé des consultations qui supposent notre « acceptabilité sociale ». Nous revendiquons une véritable démocratie politique et économique qui ne s’arrête pas aux portes du parlement et du patronat.

Les pyromanes veulent défendre leur pouvoir en éteignant ce monde en feu avec des carburants «propres». Nous voulons défendre le vivant en éteignant ce feu à la source, par la force de notre solidarité.

Nous sommes les travailleuses et travailleurs pour la justice climatique. Joignez-vous à nous.